Pages

jeudi 28 juillet 2016

Fear the Walking Dead - Psychopathes et débiles profonds


Voilà, donc après mon visionnage de la dernière saison en date de Walking Dead, bien mitigée quand même, je me suis tapé la corvée de tenter Fear the Walking Dead, en me disant que cet univers peuplé de zombies aurait peut-être encore (de nouveau ?) quelque chose d'intéressant à dire.
Malheureusement, comme je le craignais, je me trompais lourdement : si la série-mère a eu d'excellents moments malgré tout, ce spin-off m'a semblé n'avoir rien d'autre à offrir que beaucoup de vacuité et de néant.


Pour commencer, on commence sur les même principes fondateurs que l'originale : une société de merde peuplée d'incompétents et de sociopathes.
  • L'armée, en particulier, y est présentée comme les plus gros tas d'incompétents psychopathes de l'univers : avec des moyens qui suffiraient largement à endiguer une maladie aussi facile à contenir que la zombification, ils n'ont qu'une ambition : faire preuve d'incompétence et planifier la spoliation et le génocide de leurs administrés. Super programme. Dans un univers différent, ça serait peut-être justifié, mais comme, encore une fois, c'est censé se passé dans le nôtre... C'est juste de la merde.
  • La populace n'est bien entendu pas en reste ; dans la série, les premières apparitions de zombies amènent des policiers à les abattre en pleine rue, sous les yeux de témoins. Ces derniers, pensant qu'il s'agissait de civils, se plaignent. Puis font des manifs. Puis se révoltent. Forcément, comme dans la vraie vie, toutes les manifestations dégénèrent en véritables carnages et en même pas deux épisodes, les gens outrés par le comportement inadmissibles de la police cassent des vitrines et vont s'emparer de tout ce qu'ils trouvent dans les magasins, tuant si possible les tenanciers au passage. Probablement pour faire passer leur message... Ah ben non, encore une fois, c'est parce qu'à AMC, on est persuadés que ce que les gens préfèrent au monde, c'est s'entretuer pour le fun.



Je n'ai donc pas trouvé grand-chose à garder dans cette saison, ni sur le plan du rythme (magad que c'est lent !), ni sur le plan de l'écriture (morne au possible : oh mon dieu, des zombies ! Et si on réglait nos problèmes de famille en même temps ?)

Bref, une série sans grande envergure ni ambition, qui étale de façon trop évidente sa vision du monde digne de l'ami Donald Trump et qui ne présente aucun enrichissement pour l'univers de Walking Dead.
Une titanesque déception, cela va sans dire.

--- --- ---

Fear The Walking Dead, saison 1 : 3½/6 (daube)

mardi 26 juillet 2016

Un script pour Bimbo, le jdr - Zombies et nasploitation


J'ai déjà parlé il y a longtemps du jdr Bimbo, où les joueuses incarnent des actrices supposées tourner des films d'exploitation moisis en gravissant les échelons du star système.
Mes joueuses actuelles étant particulièrement motivées par l'idée, j'ai composé un petit script que j'ai mené il y a quelques jours. Le résultat a été suffisamment à la hauteur de mes espérances pour que je le partage, si d'aventure un metteur en scène (peut-être un peu expérimenté tout de même) avait envie de tenter lui aussi de tourner cette grosse bouse.

Il y a un braquage, des zombies et, bien sûr, c'est de la naspoitation (autrement dit, il y a des nazis). Parce que faut pas déconner non plus, on fait pas un bon film de merde si on n'y met pas au moins un peu de zombies et de nazis.

Voilà, ces spoilers faits, je vous laisse voir si vous avez le budget pour ça :


Notre tournage à nous s'est terminé sur une séquence alternée d'hommes en noir se scarifiant en psalmodiant "Gloire à Satan" et de zombies nazis scandant "Heil Hitler". Oui, ça augure une suite (il y a toujours une suite), mais ça montre aussi que c'est pas parce qu'on tourne un film que ça doit finir comme prévu.
Je serais bien intéressé de savoir quel genre de retournements de situations débiles interviendront dans les vôtres !

vendredi 15 juillet 2016

The Walking Dead - Hobbes avait raison

 Je viens de terminer de regarder la saison 6 de The Walking Dead, et comme chaque année, cette série a le don de m'énerver au plus haut point. Non pas qu'elle soit mauvaise ou désagréable à regarder, mais c'est une des rares séries que je suis qui a la particularité de me donner systématiquement l'impression qu'elle et moi, nous sommes en complet désaccord idéologique. Et moi qui ne fais pas de politique en regardant des séries, c'est dire.

A chaque fois, j'ai l'impression qu'il s'agit d'un espèce de pamphlet conservateur, misanthrope et dépressif qui essaye (peut-être malgré lui, je ne peux pas l'affirmer) de transmettre l'image d'une humanité qui, face à une crise d'ampleur universelle, ne serait bonne qu'à mourir et pisser dans son froc, à l'exception de quelques psychopathes mentalement perturbés qui composeraient l'essentiel des survivants (avant de mourir eux aussi comme des merdes... les cons).

Hobbes avait raison : on ne peut survivre sans se soumettre à un psychopathe

A commencer par Rick, le "héros" de la série, en passant par à peu près chaque leader de chaque communauté qu'on voit dans la série, sont tous soit des gros psychopathes (à commencer par Rick, qui correspond exactement au type d'être humain que je me fais un plaisir de haïr inconditionnellement), soit des incompétents pourris de stress post-traumatiques incapables de tenir leurs gens (puisque dans The Walking Dead, les gens ont besoin de quelqu'un pour les tenir, sinon ils meurent).
Je trouve cette vision du monde absolument hallucinante.
Bien sûr, dans le cadre d'une fiction ça peut faire son effet quelques épisodes et joliment illustrer une vision du monde nihiliste et dépressive, mais ça finit par devenir barbant de misanthropie et de mépris : après tout cette fiction est bien censée se passer dans notre monde, pas dans une dimension parallèle peuplée exclusivement de cas psy.
Il y a deux millions d'années - disons - que l'homo sapiens prouve qu'il est, sur cette planète, le mammifère le plus apte à la survie et à l'organisation sociale. Une société détruite quasi intégralement peut se reconstruire en quelques années, et ce même en l'absence d'un gouvernement centralisé totalitaire agissant par la menace (comme c'est le cas d'à peu près tous les groupes organisés dans la série), et quand une société sombre dans une crise totale, on a constaté à chaque fois que l'organisation et l'entraide apparaissent presque immédiatement.
Dans une ville bombardée (ce qui est nettement plus meurtrier que des zombies aussi intelligents que des bactéries) les morts sont tués par les missiles, pas par Dédé-le-Grand-Gouverneur-de-la-Rue-des-Lilas-qui-te-prend-tout-ou-te-bute, qui a bien entendu le soutien de tous ses voisins, parce qu'ils ont trop peur qu'il leur donne une gifle... Non, dans la vrai vie, les tyrans ont besoin d'une brigade de militaires surentrainés - la garde prétorienne - pour ne pas finir systématiquement assassinés. Par leurs propres concitoyens bien souvent...

Bref, pour moi, six saisons d'une humanité en désordre désespéré, c'est trop long.
La nature humaine (le cerveau ?) est basée sur la construction et la collaboration, et ne pas l'accepter ou être d'accord avec ça n'y change absolument rien. Face à la crise, ce n'est pas chacun pour soi, ou alors pendant 5 minutes, sans doute, face à un danger immédiat, quand le cervelet prend le contrôle, mais à l'échelle ne serait-ce que de quelques jours, on verra apparaitre une organisation sociale axée sur l'entraide, la valorisation des connaissances, le "commerce", etc.
Savoir planter un zombie, dans ce cadre-là, sera le rôle des laquais et des "policiers" des différentes communautés. La vraie ressource, les vrais piliers, ce seront les spécialistes, les détenteurs de savoirs utiles, les administrateurs, pas ceux qui savent viser bien, courir comme des cons et aboyer des conneries (et des décisions de merde) en appelant ça du leadership.

Zombies !

Bon, on le sait, comme dans tous les films de zombies, les morts-vivants ne sont pas vraiment le noyau de la série. C'est une série qui parle de gens (même si dans le cas de celle-là, ce sont plus des idiots incompétents qu'autre chose).
Il faut qu'il y ait des zombies tout le temps, partout, même après des années. Ce qui est complètement con, puisque les personnages (parfois tout de même écrits avec un peu de jugeote) essaient justement d'établir leurs camps à la campagne.
Bon. Les USA sont un grand pays plein de monde, mais la densité de population n'est pas non plus exagérément élevée quand on quitte les grands centres urbains, et les zombies ont l'intelligence d'un virus : ils se dirigent vers les sons (qu'ils peuvent physiquement entendre).
Là, on reste cohérent : pas de super-zombies intelligents dans cette série, pas de "cerveau ! cerveau !" ni d'embuscades zombies. Mais... du coup, pourquoi les survivants sont-ils aussi cons et incompétents ? L'humanité, pendant des milliers d'années, a triomphé avec succès de prédateurs beaucoup, beaucoup plus intelligents. Et organisés. Et déterminés à tuer. Et aujourd'hui, ils sont même devenus un problème quasiment anecdotique.
N'importe quel scout sait qu'on peut construire un village rudimentaire en une demi-journée, qu'on peut le fortifier en quelques jours et le transformer en forteresse de pierre en quelques mois. N'importe qui peut profiter du savoir des bibliothèques (il n'y a plus d'Internet, mais les zombies ne mangent pas les livres) pour parvenir, en quelques semaines, à fabriquer des explosifs sans recourir à l'industrie, de même qu'à produire de l'électricité en quantité satisfaisante. Sans compter les gens qui sauront déjà faire une partie de ses choses par eux-mêmes.
Les communautés organisées, ensuite, auront d'énormes avantages économiques et tactiques sur les bandes se basant sur le brigandage : comme au Moyen-âge, ou au Far West, de tels groupes auront une durée de vie ou un impact très faible : le vol de ressources est beaucoup plus risqué, et beaucoup moins profitable même sur le moyen terme, que la production directe de ses ressources.
Partir du principe que les adeptes du pillage et du génocide seront les communautés les plus puissantes me paraît plus que douteux. Non, c'est même complètement incohérent.

Donc oui, dans une société post-apocalyptique zombie, le niveau global de santé, de technologie et de sécurité pourrait chuter considérablement. Peut-être au point de la conquête de l'Ouest (une constante dans le post-apo américain), qui était une société composée de communautés pourtant bien organisées, bien défendues, basées sur les échanges communautaires et les compétences rares. Même livrées à elle-même, ces sociétés participaient à une organisation globale, sans que le gouvernement central n'ait encore pu faire le moindre pas dans leur direction. On pourrait dire à peu près la même chose du Moyen-âge et de ses sympathiques épidémies de peste qui ont tué jusqu'aux deux tiers de la population par endroits : non seulement l'humanité a survécu, mais elle parle de coloniser Mars, c'est dire.

The Walking Dead, saison 6 : 4½/6 (mouais)


Note : je suis tombé en écrivant ses lignes sur un article qui a la même opinion que la mienne. Comme quoi je ne suis pas le seul à penser que The Walking Dead est bien une série pour illustrer toute la haine de l'humanité qu'ont ses auteurs.

vendredi 12 février 2016

Jessica Jones saison 1

Je ne suis pas un fan inconditionnel des superhéros. Ni avec les héros tout court, peut-être mon esprit foncièrement et indécrottablement anarchiste. Mais j'avais bien aimé la version Netflix de Daredevil, sortie en 2015, et je me suis donc lancé avec ma moitié dans un petit binge-watching des 13 épisodes de Jessica Jones.
Je ne savais pas à quoi m'attendre, et les quelques pitchs que j'avais pu lire laissaient entendre qu'il s'agissait des mésaventures d'une détective privée confrontée à son passé...
Et j'ai donc été déçu en bien. J'ignorais tout de la Jessica Jones originelle, et son costume profondément ridicule (de ses noms traditionnels Purple Haze, Jewel, etc.), et ai apprécié que sa superforce laisse tout de même la porte grande ouverte au fantastique. Oui, je n'aime pas quand ce n'est pas fantastique. Ou au moins très profondément improbable.

Cheveux roses, costume flashy... On y a échappé de peu quand même.
Le casting est plutôt sympa, entre un Jessica Jones (Krysten Ritter) qui n'a pas peur de la rudesse et incarne à merveille l'instabilité psychologique, Kilgrave (David Tennant) qui est sans doute un des "méchants" les plus cool qu'il m'a été donné de voir ces dernières années et qui fait complètement oublier qu'il fut Dr Who dans une vie parallèle, et tous les sidekicks, opposants et figurants qui permettent à la série de toujours rester sur le fil de l'équilibre mental. Marvel nous prouve encore une fois qu'ils ont fait le bon choix en essayant de donner une teinte plus adulte, plus contemporaine et moins flashy à leurs superhéros. Parce que les costumes à slips et les héros du peuple, il y a longtemps que je n'y crois plus, personnellement.

Ce que j'ai apprécié

  • Une ambiance film noir et thriller psychologique qui ne nie jamais son origine fantastique.
  • Un grand méchant absolument mythique. Pas de costume, pas de superpalais, pas d'extraterrestre moche, pas de légion de mort-vivants. Juste Kilgrave.
  • Un format relativement court (13 épisodes) et fermé (il y aura des saisons futures, je n'en doute pas, mais celle-ci ne se termine pas sur un affreux et inintéressant cliffhanger).
  • Un rapport moderne aux personnages, des femmes (super)fortes et libres, des homosexuels au premier plan de l'histoire, etc. Franchement, pour faire évoluer les mentalités et normaliser le discours égalitaire, c'est le genre de média parfait.
  • Une narration bien maitrisée, et franchement, ça, c'est tellement important !

Ce que j'ai moins apprécié

  • Franchement, pas grand-chose, et croyez-moi, c'est rare que je ne sois pas critique...
  • Des épisodes parfois un peu longs (c'est un détail, mais je trouve que 42mn c'est parfait, 55mn, c'est longuet, surtout quand on a des choses à faire).

Conclusion

À moins que vous n'ayez pas encore vu la première saison de Daredevil (ce n'est pas nécessaire de le voir d'abord, mais c'est la base quand même), Jessica Jones vous tend les bras. Un univers glauque et urbain qui tient plus du Monde des Ténèbres que des superhéros, fortement déconseillé aux enfants (ou assimilé) mais qui plaira très probablement tant aux adeptes des films "noirs" qu'aux fans contemporains de Marvel.
Jessica Jones est sur Netflix, et comme c'est à eux partout dans le monde, même pas besoin de VPN.

(J'ai regardé cette série en VO, et sur Netflix).

dimanche 19 juillet 2015

Bimbo - Le jdr que c'est toi la vedette

Après avoir profité d'un solde monstre chez Ludikbazar Meisonnier incluant même les produits neufs, je me suis procuré Bimbo, le jdr de Grégory Privat publié chez Sans-Détour dans une belle boite (sur le même modèle que les Lames du Cardinal).
Après l'avoir laissé trainé quelques mois dans ma rôlothèque, j'ai enfin pu le tester avec mon équipe. J'étais intéressé à tester les mécaniques du jeu, et à faire jouer ce jeu que l'auteur veut résolument "iconoclaste" et "féministe".
Soyons honnêtes, j'avais mes doutes.

Bimbo pour quoi faire

Ce jeu est un jdr à "narration disputée", selon son auteur. Vous y incarnez des actrices (ou pas) dans le tournage d'un film d'exploitation - ou grindhouse - ainsi que son personnage (la première est le "système de jeu", le second les actions décrites en jeu). Le personnage fait exploser des gens et des véhicules, tandis que l'actrice achète des décors, des figurants et tente de faire rejouer les scènes où elle n'est pas à son avantage.
Car c'est l'essence de la narration "disputée" : il y a une gagnante à la fin de la partie. Il faut donc terminer le film que le metteur en scène - le MJ - propose, tout en étant la seule à être en tête d'affiche et à recevoir un bonus. Les joueuses vont donc sans cesse devoir se crêper le chignon et se mettre en avant, tout en s'assurant que le film est bouclé...
On comprend donc en quoi le jeu est "iconoclaste".

Le matériel

Le matos est beau. La boite de base et son seul supplément (l'écran du MJs et quelques accessoires) sont visuellement très attractifs. Malheureusement, il est de fort mauvaise qualité, les livrets sont de qualité magazine, noir et blanc, et pas prévu pour une utilisation sur le long terme. C'est dommage, pour un loisir dont la rejouabilité est supposée infinie...
Les cartes, les 3d6 et les jetons sont standards pour ce qui se fait habituellement dans les jeux.
Reste que, perso, je suis le plus souvent MJ et ne joue que rarement chez moi : une boite c'est volumineux et ça s’abime facilement : je n'aime pas du tout ce format.

Le texte maintenant.
  • Le livret "Actor's Studio", 64pp. Il contient la création de perso, les règles et, globalement, tout ce qu'il faut savoir pour jouer. La mise en page est sympa, le style humoristique et rafraîchissant, les règles globalement compréhensibles.
  • Le livret "Mise en Scène", 64pp, qui contient des conseils de maitrise... Volontairement iconoclastes. Là, l'auteur commence à me perdre : il n'y a pas de règles dans ce livret, seulement des conseils pour maitriser une partie qui se veut radicalement différentes des autres jdr, mais qui sont exactement les mêmes qu'on pourrait donner à n'importe quel MJ de n'importe quel jeu, le tout avec un ton qui oscille entre le délire perso et le jeu d'initiation... Ça n'est pas mauvais, mais on aurait pu se passer d'une bonne partie de ce qui est dit.
  • Le livret "Scripts", 32pp. Pour un jeu qui vise à faire des films, j'aurais préféré que celui-là soit plus long, et le précédent plus court. Les scénarios proposés sont faibles. Très faibles à mon gout. D'autant plus que le fantastique (et le western) - sous toutes ses formes - n'y occupe qu'une place très, très minimaliste, alors que, malgré tout, les films d'exploitation qui sont restés dans la légende parlent souvent de zombie, de massacres, de monstres en papier mâché et d'échanges de coups de feu devant des saloons... Là, c'est plutôt l'aspect film policier / film de gangster qui est retenu. Pourquoi pas, mais c'est dommage. Je n'aime pas finir ma lecture d'un ouvrage de jdr uniquement sur une succession de scénarios que je n'ai pas envie de faire jouer...
Le système de jeu en lui-même ne pose que peu de problèmes... Mais laisse toujours une sensation propres aux systèmes indés : le créateur s'en serait probablement bien passé, mais il a voulu en mettre un quand même, du coup on a un demi-système, qui finalement, n'apporte rien d'autre au jeu que de faire semblant de lancer des dés.

La partie

Bon, avouons-le, je juge rarement un jeu sur son matériel. Je ne suis pas collectionneur, j'ai tendance à classer dans la catégorie "sans intérêt" tout jdr qui mentionne l'existence de futurs suppléments dans son livre de base et comme je n'utilise presque pas d'écran, le matériel n'est pas une considération qui me préoccupe beaucoup.
Par contre, une première partie, ça en dit long sur la qualité d'un jeu. Comme je n'ai pas eu l'occasion de tester celui-là dans une convention ou de rencontrer son auteur, je me suis lancé avec mes propres joueurs.
Pour dresser un profil succinct, ils ont une petite expérience du jdr, ne connaissent pas beaucoup de systèmes ni d'univers et sont, dans leur grande majorité des joueurs "réactifs" (par opposition à "proactifs"). Si je ne leur propose pas de pistes à explorer ou des événements marquants, certains risquent de se regarder dans le blanc des yeux sans savoir quoi faire, et d'une façon générale, ne voient pas très bien pourquoi ils auraient leur mot à dire sur le déroulement des opérations (oui, moi aussi je trouve ça très dommage. J'y travaille).
C'est là qu'apparaît le premier problème. En offrant une part de la narration aux joueuses, la partie a un peu de peine à démarrer. Elles ne savent pas bien quoi faire, n'utilisent pas beaucoup des ressources mises à leur disposition et surtout ne cherchent pas (tout de suite) à s'opposer les unes aux autres.
Du coup, la partie devient de plus en plus difficile pour les joueuses - elles finiront par boucler le film sur un échec, écrasées lamentablement par les méchants, malgré un système de jeu garanti par son auteur comme penchant totalement du côté des joueuses. Avec les siennes, peut-être. Avec les miennes, le système de jeu les a écrasées en quelques tours de table. Et j'ai regretté sa règle disant qu'il était interdit au metteur en scène de tricher...

Conclusion

Bimbo ne m'a pas tellement plu.
Je comprends ce qu'il peut y avoir d'intéressant, surtout pour moi qui suis un joueur extrêmement proactif, mais cela reste un jeu indé qui ne s'adresse pas du tout à un public de rôlistes casual, c'est un jeu pour vieux dinosaures qui recherchent de nouvelles choses, ou pour des joueurs qui ont une certaine expérience du théâtre d'improvisation (ce qui est mon cas, par exemple, mais pas du tout celui de mes joueurs). Et surtout c'est un jeu qui vous gardera une, deux, trois parties. Après, vous n'y retoucherez plus - avec son second degré assez monomaniaque (les bimbos) et son absence de véritable enjeu imaginaire (changer durablement le monde, etc.), c'est un jeu qui lasse, vite et beaucoup.
L'auteur semble voir dans son oeuvre une bonne opportunité d'initier au jdr... Mais je me demande si ce n'est pas finalement là un de ses fameux traits d'humour. Parce qu'utiliser Bimbo pour initier au jdr me paraît non seulement un mauvais choix, mais aussi une erreur.
L'aspect "féministe" du jeu ne fonctionne qu'avec un esprit second degré très marqué. Heureusement, le second degré, ça me convient en général.
Le jeu part du principe qu'on joue des actrices connasses et prêtes à coucher pour réussir leur carrière, qui incarnent des femmes fortes et badass dans des films pourris. Ça fonctionne bien un moment, mais, tant à la lecture que dans le jeu lui-même, on se demande si ça n'est pas plutôt une excuse bidon pour vendre un jeu à des rôlistes quadras frustrés qui veulent s'imaginer des connasses imbéciles en train de sucer des producteurs lubriques.
Franchement, ce jeu me fatigue, et je me demande si j'ai vraiment fait un bon achat.
Bref, j'ai gardé mes doutes.

Finalement, c'est en jdr comme au cinéma : je me méfie de l'exploitation - c'est bien une fois de temps en temps, mais rien ne vaut un bon blockbuster. 

lundi 29 juin 2015

Sorceleur - La Saison des Orages

Certains ont connu le sorceleur Geralt de Riv parce que c'est le héros de leur jeu vidéo favori, d'autres parce que c'est le héros d'un cycle de fantasy polonais pas tout à fait commun, né sous la plume d'Andrzej Sapkowski. Vous aurez sûrement compris que je suis dans ce second cas puisque, à l'heure actuelle, je n'ai encore touché aucun des trois jeux concernant ce chasseur de monstres aussi séduisant que bien intentionné et peu sociable.

Les éditions Milady (filiale poche de Bragelonne) ont publié il y a peu le huitième roman de la série, un spin-off se déroulant avant les événements du cycle de base, mais faisant intervenir quelques personnages bien connus des fans, notamment le truculent barde Jaskier et la brûlante sorcière Yennefer.
Soyons tout de suite honnêtes : cet opus raconte une histoire secondaire et n'est pas du tout indispensable à la compréhension du reste de la série... Même si l'épilogue réserve une (toute) petite surprise à ceux qui se demandent ce qui se passe après les aventures qu'ils connaissent bien.

Je suis moi-même cette série depuis que je l'ai découverte en 2012, parce que j'ai trouvé son style sympa, et les jeux de l'auteur avec les différents tropes de la fantasy et des contes traditionnels sont rafraichissants et bien différents de ce que nous auraient donnés des auteurs français ou anglo-saxons - sans doute parce que le filtre culturel de ces derniers nous est nettement plus familier.
Ce huitième bouquin n'échappe pas à la règle, nous présentant une aventure du sorceleur un peu hors-normes, pleine de rebondissements et en profitant comme toujours de nous raconter plusieurs histoires qui ne sont que vaguement connectées par un seul élément : Geralt s'est fait volé ses épées soi-disant légendaires et sa quête pour les retrouver le mènera à se faire trimbaler un peu partout, sur sa fidèle jument Ablette, en se téléportant, par bateau, dans des forêts profondes et des industries charbonnières, dans des villes, un marais hanté et des citadelles de magiciens.
L'occasion pour l'auteur de nous exposer tout un bestiaire fantastique comme il en a le secret : créatures artificielles, magiciens psychopathes, renardes et j'en passe...

Je ne pourrais pas trop vous détailler l'action sans vous dévoiler plus que je ne devrais, mais j'ai trouvé  - cette fois encore - que le style et le rythme étaient remarquables, les enjeux sympathiques et le final d'une violence extraordinaire et plutôt inattendue (j'aime ça).
La traduction de Caroline Raszka-Dewez est toujours aussi remarquablement rédigée, donnant ses couleurs si particulières à ce monde imaginaire.
Malheureusement, ne maitrisant pas du tout le polonais, je ne peux pas juger de sa fidélité, je ne peux que l'espérer.

Bref, si vous avez lu le reste du cycle et que vous avez aimé, vous apprécierez sans problème. Si vous ne connaissez pas encore Geralt de Riv, je ne saurais que vous conseiller d'entamer la lecture de ses aventures, et cet ouvrage peut très bien être un très bon plan pour commencer, puisque justement, il introduit le personnage sans empiéter sur ses "quêtes principales".

Sorti mai 2015, chez Milady et ton libraire préféré,

jeudi 25 juin 2015

7Wonders - C'est l'heure du d..d...d..duel

À l'occasion du festival Paris est ludique ! 2015, magnifique petit festival parisien où l'on joue avant tout (par opposition à "où l'on regarde et achète avant tout"), j'ai pu défier ma moitié en avant première à 7Wonders Duel (et me faire rétamer la tronche, évidemment).
Ce spin-off du jeu de draft d'Antoine Bauza, plusieurs fois primé, verra la lumière des étals de marchands à l'occasion d'Essen, mais cette partie test m'a permis de découvrir les ficelles d'un petit jeu sympa qui devrait réjouir les fans du jeu de base qui en ont marre de ne jamais pouvoir y jouer quand ils ne sont que deux (sans utiliser une variante bizarre), et les autres aussi, puisque cette petite boite est parfaitement indépendante, et ne demande pas même de connaitre les règles originelles pour jouer.

Un petit aperçu des règles

Comme dans 7Wonders, le jeu se déroule en trois âges. Chaque joueur choisit plusieurs merveilles, qui ne possèdent ici qu'un unique pouvoir très particulier, conduisant à l'une ou l'autre des conditions de victoire.
Les cartes de l'âge en cours sont ensuite disposées sur la table, certaines face visibles, d'autre non, de façon à former une figure où seules les cartes "libres" (donc non chevauchées par d'autres) sont disponibles.
Chaque joueur joue ensuite son tour - c'est-à-dire prend une carte libre et choisit ensuite de la jouer, de l'utiliser pour une merveille ou de la vendre. Rien de bien nouveau ici. Ce qui change, par contre, c'est que les ressources s'achètent désormais à la banque - le joueur d'en face peut seulement vous obliger à payer plus pour vos ressources (beaucoup plus).
Les cartes sont chères, et les ressources rares - l'argent prend une place beaucoup plus importante dans cette version du jeu, où vous oscillerez toujours entre la parfaite indigence et la richesse absolue - mais ça ne durera pas. Et heureusement, la mécanique des chainage est là pour éventuellement vous aider... Quoi que. Un bon point, du coup : l'argent et son usage ont vraiment un sens dans ce Duel.

Une version d'essai. La version actuelle est terminée, nous avons donc eu entre les mains la version finale, nettement plus attrayante à l’œil et conforme au design de l'original... Mais pas encore disponible publiquement...

Pour gagner...

À la différence du jeu de base - et à ma grande surprise - il y a cette fois plusieurs conditions de victoire.
Une petite plaquette est fournie avec le jeu, sur laquelle on va placer un "marqueur" militaire, qui servira à écraser l'adversaire de ses armées. Dans cette version Duel, les "boucliers" ne servent plus à gagner des points en fin de manche, mais sont tout de suite pris en compte pour commencer votre invasion. Atteignez l'adversaire, et vous pourrez danser dans les ruines de sa civilisation. (Croyez-moi, c'est dur, je n'y suis pas arrivé).
Sur la plaquette viennent également se placer des "technologies", que vous pourrez acheter en développant vos sciences (il y a 7 symboles scientifiques, si vous obtenez deux fois le même, vous débloquez une de ses technologies, au choix). Croyez-moi, vous ne voulez pas que votre adversaire les achètent : elles sont très puissantes (votre adversaire peut par exemple prendre le monopole commercial en vous obligeant à lui verser TOUT ce que vous devriez normalement payer à la banque,,, Ouch !). Ces technologies sont un véritable avantage pour gagner la partie... Mais ne suffisent pas.
La deuxième façon de gagner est de prendre l'avantage scientifique : il y a 7 symboles (contre les 3 du jeu de base), cumulez-en 6 différents et la victoire est à vous ! (Croyez-moi, la première fois ça vous tombera dessus sans que vous compreniez ce qui vous arrive).
La dernière condition de victoire intervient en fin de partie, si les armées sont embourbées et que la science stagne : seule comptera alors votre trace dans l'Histoire, représentée par les points de victoire, qui fonctionnent comme dans l'original : les cartes bleues, certaines merveilles et un peu de vos finances.

Mon avis

Malgré que nous n'ayons eu droit qu'à une seule partie, les gens se pressant un peu pour le tester, l'impression que j'en ai eu est excellente - et ceux qui connaissent mon naturel plutôt critique se diront tout de suite que c'est plutôt bon signe.

Ce que j'ai aimé :

  • Ça bouge. Les tours sont rapides, les conditions de victoire peuvent rapidement terminer la partie et obligent à être toujours aux aguets. C'est tendu, cruel, vicieux, stratégique, tactique, et ça, c'est bien. Et une partie dure environ 20mn, ce qui est pas mal pour un jeu de cet acabit.
  • C'est équilibré. Hormis qu'on sent qu'une bonne stratégie vous donnera un certain avantage, tout fonctionne. Vous avez toujours la possibilité d'accumuler des avantages et celui de bloquer l'adversaire. Entre joueurs investis, les parties promettent d'être intéressantes.
  • Ça se renouvelle. La disposition aléatoire des cartes, le choix des technologies et des guildes permettent une rejouabilité certaines - je ne peux pas m'avancer plus que cela après une seule partie, mais il est certain que la configuration peut changer drastiquement d'une partie à l'autre.
  • Plusieurs conditions de victoire, plus d'argent, plus de guerre. L'échelle militaire - qui s'approche ou s'éloigne de vous - rajoute une tension très intéressante au jeu. Aucun coup n'est gratuit, aucun cadeau n'est permis. Et la nouvelle conception de l'argent et des ressources oblfe à avoir une vraie politique économique. Et ça, c'est bien.

Mes doutes

  • Les règles... ne sont pas vraiment compliquées (si on connaît le jeu de base), mais comme nous n'avons eu droit qu'à des explications orales, il manquait toutes sortes de détails et nous nous sommes retrouvés devant des situations spécifiques sans trop savoir quoi faire. Rien de bien méchant, mais il s'agit d'un de ces jeux où il faut lire les règles pour les comprendre bien. (Sans compter la multitude de nouveaux petits symboles inconnus dans la version ancestrale)
  • La petite boite et les petites cartes sont une bonne idée, mais la configuration exigeant tout de même une table, j'aurais préféré des cartes de taille standard (bridge), puisque de toutes façons, on peut difficilement jouer sur une banquette de train.
  • C'est un Duel. Bon je sais, c'est l'idée. Et je n'ai rien à redire. Jouer à deux, c'est bien. Jouer "seulement" à deux ça peut - selon sa pratique du jeu, limiter passablement les possibilités d'abimer sa boîte.

Verdict

Pas de doute - je l'attends avec impatience et irai voir mon dealer dès que j'apprendrai sa mise en rayon.
Reste qu'il va encore falloir le prendre en main un peu plus en détail, l'explorer et l'apprivoiser pour pouvoir s'en faire une idée qui repose davantage sur l'expérience, pour tester sa rejouabilité, en particulier, et l'étendue des stratégies possibles.
Mais si vous aimez 7Wonders, que vous rêvez d'y jouer à deux avec des règles faites exprès (loin de la variante "3ème cité sans joueur" du jeu de base), et qui plus est avec de véritables conditions de victoire... Je ne vois pas pourquoi vous hésiteriez.
En plus, c'est un "petit jeu", d'après la demoiselle de chez Repos Productions qui nous y a initié, il ne devrait donc pas dépasser la fourchette des 15-20€